Le
concert avait lieu au Bateau-Ivre, la salle qui, grâce à
la mythique Radio Béton, programme la plupart des concerts
rock de la ville.
Première constatation, la salle est archi-pleine et c'est
normal, après une si longue attente... La salle est un ancien
cinéma avec un balcon où les gens sont assis et "la
fosse" où je m'installe debout. A priori, ce soir ça
pogotera moins que lors d'un mémorable concert des Buzzcocks
il y a quelques années, au cours duquel j'avais dû
me réfugier au fond de la salle pour terminer entier... Mais
revenons au public muratien. Qui sont donc les 400 personnes présentes
ce soir ? Difficile de brosser le portrait du fan moyen en fait...
Disons que le "coeur de cible" est un trentenaire type
télérama/libé, ce n'est pas ce qui manque à
Tours. Mais le public est bien plus large et comprend aussi bien
des minettes de 15 ans que des septuagénaires qui doivent
s'attendre à découvrir un héritier direct de
Ferré ou Brassens... Le public rock est également
présent dans la fosse, bière en main, curieux de découvrir
ce show annoncé comme très électronique.
Pas de première partie, les instruments sont prêts
à accueillir Murat et ses acolytes. La quantité de
synthés présents sur scène ne laisse aucun
doute quant à la tournure électronique des événements
qui vont suivre, même si les guitares (acoustiques, électriques,
électro-acoustiques) sont également très présentes.
Ca y est, la musique (album de Day One) s'arrête, les lumières
s'éteignent. Trois hommes entrent sur scène et la
musique commence. Ovation du public tourangeau, le quatrième
homme vient d'apparaître. Murat est souriant, c'est bon signe.
Il s'asseoit, s'empare de sa guitare et glisse un "bonsoir"
avant de commencer à jouer. C'est Jim, le premier
single extrait de Mustango, qui a l'honneur d'ouvrir le bal. Version
plus lente que celle du disque. Les voix de JLM et Jennifer Charles,
qui est bien entendu absente, s'entremèlent pour une réussite
totale. De la même façon que la guitare de JLM est
soutenue par la rythmique et les bidouillages électroniques
de ses camarades. Ca commence bien. Fin du morceau, applaudissements
nourris, ça siffle et ça crie. Le public tourangeau
a l'air de vouloir faire mentir sa réputation de public froid.
La rythmique s'affole, un déluge de sonorités diverses
s'abat sur la salle et JLM joue de la guitare acoustique. Ca ne
ressemble à rien de connu et effectivement, c'est le premier
inédit du concert. Ca s'appelle Washington et c'est
une merveille. En plus, c'est une chanson "engagée"
et quelques phrases méritent d'être retenues : "Où
doit on ranger la cantine, ces quelques restes d'Ocalan. Ah il faut
aimer jouer des coudes, à Washingtooon". Bien sympa
aussi le vocoder. Avant la fin du morceau, Murat coupe la rythmique
(il dispose d'une table de mixage pour cela) et ça finit
tout en douceur. Le public apprécie et le fait savoir. Troisième
morceau et l'on reste dans la même veine avec une basse envoutante
pour une version aérienne de Polly Jean ponctuée
de petits "hé hé hé hé hé"
de JLM qui font craquer les jeunes filles. A la fin de la chanson,
Murat s'excite sur se guitare en secouant sa tête baissée.
Il vit sa chanson. Trois titres et le concert est déjà
bien lancé. Il se lève et va s'installer au piano
tout en ajustant son harmonica. Quelques mots "Vous allez bien
? Moi ça va pas mal..." et il attaque Mustang,
première chanson du set à être vraiment fidèle
à la version de l'album, harmonica en sus. Un frisson parcourt
la salle. Murat reste au piano et enchaîne avec Au mont
Sans-Souci, le single que le public reconnaît de suite
ce qui provoque quelques applaudissements dans la salle. Comme pour
Mustang, la version est très fidèle à celle
de l'album. C'est le morceau qui recueille les applaudissements
les plus nourris depuis le début du set, comme si les spectateurs
aimaient pouvoir évoluer en terrain connu.
Murat quitte le piano, attrape son micro alors que l'intro de la
chanson suivante démarre. Il s'avance vers le devant de la
scène. Il n'a pas vraiment soigné son look ce soir.
Jean noir, sweat-shirt, chaussures de montagne et cheveux en bataille...
mais même comme ça, les filles sont toutes folles de
lui. Au passage, il a mis un cd dans sa platine et la voix de Jean
Genet accompagne l'intro des Hérons, un grand moment
du concert. Cette chanson, sublime sur l'album, l'est tout autant
sur scène. Tout comme Le fier amant de la terre pour
laquelle Murat a retrouvé sa position assise. Décidemment,
ces versions live sont vraiment séduisantes et mettent en
valeur la qualité de ces chansons, probablement plus que
l'album. Nouvel inédit qui n'en est plus vraiment un avec
la sortie du single sur lequel il est présent, New Yorker
succède au fier amant... Rien à dire sur cette chanson.
C'est superbe, point. Et le meilleur reste encore à venir.
Une intro lente. Tiens, ça serait bien Bang Bang...
Mais les premiers mots sont "Ciel ciel il fait un temps de
chien..." et les vieux fans d'exulter : on ne s'attendait pas
à entendre Terre de France, ce chef d'oeuvre absolu,
ce soir... Mais très vite, ce sont les premiers mots du Baiser
qui se font entendre. Medley ? Pas tout à fait puis c'est
effectivement Bang Bang qui commence finalement après ces
quelques souvenirs... Sans doute une manière de montrer que
Bang Bang est bien le lien le plus évident entre Mustango
et les disques précédents de Murat... La fin de Bang
Bang est fantastique. Après avoir hurlé "Mais
qu'auriez vous fait sans moi, mes petits chats...", Murat attaque
une série de miaulements qui provoque un tonnerre d'applaudissements...
Tension et moment de détente enchaînés séduisent...
Le fidèle Denis s'installe au piano et Murat s'avance à
nouveau sur le devant de la scène : "Une chanson d'amour
pour les filles... Heureusement qu'il y a les filles...". Et
les filles ne peuvent résister à Ami Amour Amant,
elles fondent littéralement à l'écoute du deuxième
inédit du set. Presqu'un moment de recueillement... Ce qui
ne sera pas le cas de la chanson suivante, Belgrade, pour
laquelle les garçons sortent la grosse artillerie : rythmique
plombée, piano dissonnant, guitares saignantes, bruitages
divers et variés : ça part dans tous les sens pendant
plus de 10 minutes de pur bonheur. Murat a même ajouté
quelques mots en patois auvergnat... Et quand il répète
"dormir... dormir... dormir...", on a envie de crier qu'on
n'est pas du tout pressé d'aller se coucher... Je me retourne
pour observer le public. Même s'il est dans son ensemble enthousiaste,
il semble que quelques personnes ne se sentent pas très à
l'aise dans cette ambiance décapante. Ben non, c'est pas
un concert de variété... Mais c'est un concert varié
: Murat retourne s'installer au piano pour une chanson qui parle
"de rivière et de vélo... Vous avez ce qu'il
faut pour les rivières : la Loire, le Cher...". Rivière,
troisième inédit, est magnifique dans ce dépouillement
piano-voix. Ca se termine par un petit discours sur le cyclisme
"De Bastogne à Liège, moi je voulais être
impressionnant... De Bastogne à Liège... Sur le tour
de France avec le maillot jaune... et sur Paris Tours aussi... Bonsoir...".
Et Murat quitte la scène. Déjà. Mais le public
a du répondant et n'a aucun mal à faire revenir les
garçons sur scène, Denis et Jean-Louis pour le moment.
Denis s'empare de la basse et c'est Viva Calexico qui nous
est servi, dans une version "de routine" qui, une fois
n'est pas coutume, n'apporte pas grand chose ce qui n'empêche
pas le public d'apprécier. Comme il va apprécier l'inédit
qui suit, Giscard. Il est vrai que dans la ville de Royer,
une chanson sur Giscard, ça ne peut que plaire... Murat profite
de l'intro pour présenter ses camarades "Alain, on s'est
connu sous Giscard...", "Denis, c'est le printemps, il
va falloir penser au régime...", "Régis,
livré directement depuis les Andes, avec le bonnet...".
Suit une petite explication sur la chanson, Vulcania, les impôts
et tout ça... Les tourangeaux qui paient le Vinci légué
par Royer à leur ville sont bien placés pour comprendre...
Cette chanson est géniale avec les 3 guitares acoustiques
et le mini-moog. Décidemment, la tournée est bien
fournie en inédits... Le public aime bien connaître
les chansons qu'il entend sur scène mais ces inédits
se savourent dès la première écoute... Savourer
n'est peut-être pas le verbe le plus adapté pour ce
qu'on ressent à l'écoute de la dernière chanson
du concert, Nu dans la crevasse. On ne savoure pas une tarte
à la crème quand on la prend dans la gueule. Et Nu
en version live ressemble un peu à un test de respect des
normes parasismiques par les constructeurs de salles de spectacles...
Et l'organisme humain est aussi mis à rude épreuve.
Le quart d'heure que dure la chanson est physique, à la limite
du mal au bide... Et quand l'engin efface Murat qui quitte la salle
définitivement, il faut quelques minutes pour reprendre ses
esprits. Même si on continue d'applaudir dans l'espoir que...
c'est fini et c'est bien de rester sur cette impression. C'est certain,
personne n'est resté indifférent ce soir. La plupart
ont adoré, certain ont dû détester mais tous
se souviendront de ce premier concert tourangeau de Murat. Et aussi
de sa gentillesse lorsqu'il vient ensuite à la rencontre
de son public pour une interminable séance de dédicaces
et de questions-réponses...
Voilà.
En fait, ce concert n'a pas eu lieu. Jean-Louis Murat n'a toujours
pas chanté à Tours... Alors si les responsables du
Bateau Ivre (ou d'une autre salle tourangelle) et de l'Olympic pouvaient
faire quelque chose pour la tournée d'automne... Merci d'avance.
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