Vulcania
"...
il paraît, André dit qu'à Orcines,
Ils veulent nous construire un genre d'usine,
Un truc affreux en fer que veut Giscard,
Je te jure quel tocard !
Ils auraient pas bien lu le réglement
Ils ont fait un trou,
Ils ont rien mis dedans.
Au lieu de nous faire payer des impôts,
Qu'ils nous donnent du boulot !..."
Au pays de Giscard - Inédit Mustango tour
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Giscardoscope
? La naissance du projet.
Le projet est
né il y a un peu plus de 10 ans, à l'initiative du
couple de volcanologues Katia et Maurice Krafft. Leur projet est
monstrueux : construire un musée sur le volcanisme au coeur
même du plus célèbre des puys, le Puy de Dôme
: un délire total. Même Valery Giscard d'Estaing est
suffisamment lucide (ou jeune ?) pour rejeter ce projet.
Après le décès du couple Krafft (accident sur
un volcan japonais), le projet réapparaît sous une
nouvelle forme en 1992. Et cette fois, c'est Giscard le pilote.
Le conseil régional a acheté un ancien terrain militaire
sur la route de Limoges, entre Orcines et Saint-Ours. Le site, au
coeur de la chaîne des Puys, semble idéal pour parler
"volcans".
Ce que sera
Vulcania.
Vulcania se
veut essentiellement un outil pédagogique de découverte
du Volcanisme. Le projet garde une origine scientifique même
si pour attirer un large public, l'approche se veut ludique et multimedia.
Les architectes retenus, l'autrichien Hans Hollein et le français
Philippe Texier ont eu pour mission de créer un ensemble
s'intégrant dans le paysage local. Leur projet est basé
sur deux éléments principaux : un cratère de
38 m de profondeur et un cône de 28 m de hauteur. La quasi
intégralité des équipements seront souterrains.
Parmi les "attractions" du site, on trouvera notamment
des reconstitutions (coulées de lave, sources d'eau chaude,
jardin exotique), des projections (éruptions, images spatiales,
survol de paysages volcaniques, images 3d), des expositions permanentes
ou temporaires sur le volcanisme et d'autres sujets avoisinants.
Bien entendu, on trouvera aussi les inévitables restaurants
et boutiques de souvenirs. Bref, ça ressemble plus à
une auberge espagnole qu'à un volcan tout ça...
Que reprocher
au projet ?
Les reproches
faits au projet son nombreux. Financiers, écologiques ou
plus symboliques, ils ont en tout cas mobilisé une très
forte opposition pendant de nombreuses années. Maintenant,
il semble que la construction de Vulcania ne puisse plus être
remise en cause mais il faut rester vigilant, notamment sur la naissance
probable de futurs projets annexes...
Le fait
du prince : c'est une tradition en France et on s'en passerait
bien. Chaque homme politique en fin de carrière exprime le
souhait de laisser une trace dans l'histoire. Et qu'est ce qui résiste
le mieux au temps qu'un blockhaus ? Selon le niveau de pouvoir du
politique en question, on est confronté à une médiathèque,
un palais des congrès, un parc d'attraction... La cas extrème
est bien entendu celui de Mitterrand avec la politique des grands
travaux : on n'est pas prêt de l'oublier François...
Vulcania est à l'évidence la trace que veut laisser
Giscard dans le paysage auvergnat.
Le coût
du projet : A l'origine, le projet était estimé
à 300 millions de francs. Les coûts des projets publics
sont toujours sous-estimés : procédures d'appels d'offre,
pots de vins et aléas divers font grimper la note. Pour Vulcania,
ils font très fort. Début 2000, l'estimation est supérieure
à 600 millions de francs et il est probable que l'addition
finale sera encore plus salée. Il reste que cela n'est pas
énorme en soi comparé au budget annuel de la région
(plus de 2 milliards de francs). Des projets de ce coût ont
déjà été réalisés dans
des villes moyennes (Le Vinci à Tours, par exemple) et là,
les contribuables ont vraiment trinqué. Mais en cas d'échec
commercial du projet, la note peut se corser s'il faut constamment
renflouer les caisses à coup de subventions publiques...
L'environnement
: Avec la complexité du droit français en matière
d'environnement et d'urbanisme, attaquer un projet sur ses atteintes
à l'environnement est de loin le moyen le plus efficace de
lutte contre celui-ci. De plus, étant donnée la majesté
du site retenu, on ne pouvait a priori qu'être inquiet à
ce sujet. Premier élément : le terrain acheté
par le conseil régional était occupé auparavant
par une dépot de carburant, probablement plus polluant qu'un
musée du volcanisme.
En fait, soyons honnêtes, le projet en lui même ne représente
pas un grand danger pour l'environnement. Le chantier se déroule
dans un luxe de précautions (qui ne sont pas étrangères
à l'inflation du budget prévisionnel). Et 3000 visiteurs
par jour, ça n'est probablement pas plus que la foule qui
se presse aux sommets du Puy de Dôme ou du Sancy pendant la
saison estivale. Là, l'impact sur l'environnement est bien
plus fort...
Mais tout ça, c'est en tenant compte du projet initial. Car
très vite, il est probable que d'autres projets vont voir
le jour autour de Vulcania. Hôtels, restaurants, équipements
de loisirs risquent de fleurir au coeur de la chaîne des Puys.
Mais pour que ces craintes se concrétisent, il faudrait encore
que Vulcania ait un succès suffisant pour entraîner
cette dynamique...
Un succès
pas si évident : De par son thême, Vulcania offre
des possibilités de développement assez limitées.
Admettons que le volcanisme est un sujet d'un intérêt
pédagogique indiscutable et suscite la curiosité des
êtres humains, impuissants face à cette puissance de
la nature. Mais est-ce que cela suffira à faire venir en
Auvergne d'autres publics que les groupes de scolaires en voyage
de fin d'année ?
Et surtout, comment faire évoluer le site pour proposer constamment
des nouveautés susceptibles de faire revenir les visiteurs
? Le volcanisme, c'est moins vaste que Disney ou le futur ! Là
est le véritable challenge pour Vulcania : s'inscrire dans
la durée. Sinon, il est probable qu'il n'y ait très
vite plus rien dans le trou...
Auvergne
= volcans ? Il est évident que le volcanisme a façonné
les paysages de l'Auvergne des monts du Cantal à la chaîne
des Puys. Que ce soit dans les pubs Volvic, sur le logo du conseil
régional ou sur l'aire d'autoroute conçue par Boffil,
les volcans sont utilisés comme symbole de l'Auvergne. Soit.
Vulcania enfonce le clou. L'intérêt de l'Auvergne a
arrêté de vivre il y a plus de 7000 ans ! Bien avant
Michelin... Et la Dordogne, la Sioule, Chaudefour, le Saint-Nectaire,
les basiliques romanes, les Salers, la gentiane, le Cézallier,
la banne d'Ordanche... on s'en fout ? N'est ce pas plus intéressant
que d'aller observer les volcans martiens 30 mêtres sous terre
? Et encore, là on reste dans une Auvergne idéale
pour touristes... Parce que pour les paysans qui crèvent
à petit feu ou les 27 habitants de La Godivelle, Vulcania
c'est du délire... Là est toute la vérité
de la chanson...
Pour conclure
Pour citer
M. Giscard d'Estaing lui-même : "Aujour'hui, les questions
concernant Vulcania ne sont plus : faut-il le faire ? Où
l'implanter ? Car ce n'est plus un projet. C'est désormais
une réalité bien vivante..."
Vulcania ouvrira ses portes au printemps 2001. Pour finir sur une
note positive, souhaitons lui bonne chance ainsi qu'à ceux
qui auront la chance d'y trouver un emploi. Et gageons que Vulcania
permettra à un bon nombre de visiteurs de profiter de leur
séjour en Auvergne pour tomber sous le charme de cette région
fantastique... Oui, soyons positifs...
Bibliographie
- Télérama
n°2612 du 2 février 2000
- C'est l'Auvergne ! (magazine du conseil régional) n°4
et n°5
- Vulcania - Explorez l'univers des volcans - Plaquette promotionnelle
- Vulcania - Manuel pratique, technique et commercial
- Vulcania, site officiel
Merci à Annie pour le prêt des documents.
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